L’Arctique a aussi son trou dans la couche d’ozone

Depuis des décennies, chaque fois qu’on fait allusion au “trou dans la couche d’ozone”, on parle de l’affaiblissement de la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique. Or, les chercheurs du laboratoire Atmosphère et Observations Spatiales, de l’université Paris-Saclay, ont observé cette année un trou dans la couche d’ozone, mais au pôle Nord, ce qui est plutôt rare puisque c’est arrivé seulement deux fois en treize ans, contrairement à l’Antarctique où cela se produit tous les printemps.

Les ultraviolets donnent naissance à l’ozone

L’ozone se forme dans la stratosphère entre 10 km et 50 km d’altitude, et majoritairement au niveau des tropiques. C’est le rayonnement ultraviolet qui brise les molécules d’oxygène (O2). Ce mécanisme libère des atomes d’oxygène (O) qui se combinent, par la suite, à des molécules intactes d’oxygène pour former l’ozone (O3). Puisque le rayonnement est plus intense au niveau des tropiques, c’est là que se formera l’ozone, qui sera ensuite redistribué partout sur la planète par les vents stratosphériques.

Il y a trois raisons qui font que les plus grandes quantités d’ozone se retrouvent en Arctique. Premièrement, pendant plusieurs mois, chaque année, l’Arctique est plongé dans le noir pendant sa saison hivernale. L’ozone se forme sous l’influence du Soleil au niveau des tropiques, mais est dissout par celui-ci au niveau des pôles. Sans énergie solaire pendant de longs mois, la dissociation naturelle des molécules d’ozone est considérablement ralentie. Deuxièmement, l’apport d’ozone vers les pôles est plus élevé en hiver. La circulation des vents stratosphériques y est pour quelque chose, puisque l’intensité de ceux-ci varie selon les saisons. Et troisièmement, la stratosphère est plus épaisse au niveau des pôles que n’importe où ailleurs. Dans l’atmosphère, la stratosphère est située au-dessus de la troposphère qui a une épaisseur de 18 km au niveau des tropiques, mais seulement de 8 km aux pôles. Cette différence crée une pente, comme le fond d’une piscine, dans l’atmosphère. Ce faisant la stratosphère offre une épaisseur maximale au niveau des pôles, et c’est dans celle-ci qu’on retrouve l’ozone.

Le froid intense responsable du trou

Il existe deux facteurs responsables de la destruction de l’ozone au printemps. Le premier, c’est le vortex polaire. Cette circulation fermée au niveau des pôles commence à se former dès le début de l’hiver. Plus cette circulation s’intensifie, plus l’air au niveau du pôle est coupé du reste de la circulation mondiale. À ce moment, les températures dans la stratosphère chutent très bas, tout près des -80 °C. Il va alors se créer des nuages stratosphériques polaires, c’est le deuxième facteur. Leurs compositions de glace, d’acide nitrique et d’acide sulfurique favorisent, au moment du retour du soleil au printemps, la dispersion du chlore et du brome contenus dans certains éléments, comme le fréon et les chlorofluorocarbones, utilisés dans les bombes aérosol et les gaz réfrigérants. Ce sont ces molécules qui détruisent l’ozone. De plus, la circulation fermée du vortex polaire empêche une arrivée de nouvel ozone, en provenance des tropiques, qui normalement remplacerait celui perdu.

On assiste plus souvent à ce mécanisme atmosphérique en Antarctique, car c’est l’endroit sur Terre où il fait le plus froid. Cette année, le pôle Nord, aussi, a connu de longues périodes de grands froids. De plus, le changement climatique va augmenter ce phénomène, car plus la température augmente dans les basses couches de l’atmosphère, plus elle diminue, par compensation, dans la stratosphère.