Du jamais vu sur les Grands Lacs : des conséquences pour le Québec

Il y a dix fois moins de glace que d'habitude sur la surface des Grands Lacs. Du jamais vu en février. Il pourrait y avoir des conséquences pour le Québec.


Une baisse de 92 %

En moyenne, à ce temps-ci de l'année, plus de 40 % de la surface des Grands Lacs, soit les lacs Supérieur, Huron, Michigan, Érié et Ontario, est recouverte de glace. Mais les images satellites ne mentent pas : en date du 11 février, moins de 3 % de la surface était gelée. Du jamais vu en février. Le lac Supérieur, pourtant le plus au nord des cinq, n'est recouvert de glace qu'à 1,7 %. La surface du lac Ontario dépasse à peine la barre de 1 %. Et il faut être très observateur pour voir de la glace sur le lac Érié, car elle recouvre un millième de sa surface. Seul le lac Huron dépasse les 5 %. Et la majorité de la glace se trouve dans la baie de Saginaw, ou autour des îles Manitoulin, là où les eaux sont peu profondes.

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Un niveau record

Depuis que l'on surveille le couvert de glace par satellite, soit en 1973, on n'a jamais observé moins de 4,5 % de surface glacée sur les Grands Lacs en février. Voilà une autre conséquence d'un hiver exceptionnellement doux sur toute l'Amérique du Nord. Le 9 février, Toronto a connu sa 5e journée de février la plus chaude de son histoire, avec un maximum de 15,7°. La température moyenne dans la Ville Reine pour les dix premiers jours de février a été de 2,0°. Il y a même eu de la pluie aux abords de la baie James, soit au nord du 51e parallèle.

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Des conséquences possibles

Cette vague de douceur a eu raison d'une grande partie du couvert de glace, qui avait atteint 16 % le 22 janvier. Cette couverture était tout de même sous la moyenne de près de 25 % pour cette période, mais beaucoup moins exceptionnelle que les chiffres de février. Un déficit de glace peut avoir des conséquences néfastes sur l'écosystème des Grands Lacs. Entre autres, la prolifération des algues nuisibles pourrait s'accélérer. L'érosion sur les berges pourrait aussi être plus importante. Mais surtout, c'est la météo autour de ces cinq lacs qui pourrait changer.

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Moins de grands froids

Tout d'abord, les masses d'air froid se réchauffent un peu en passant au-dessus d'un grand plan d'eau libre de glaces comme les Grands Lacs. Il y a donc moins de chances d'avoir de grands froids à l'est de ce secteur. Les masses d'air arctiques provenant directement du nord, elles, ne seront pas affectées.

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Des bourrasques plus intenses

De plus, on entend souvent parler de tempêtes monstres autour des Grands Lacs. La région de Buffalo, par exemple, a eu sa part de terribles épisodes de fortes chutes de neige. En décembre 2022, 43 personnes avaient perdu la vie lors d'une tempête qui avait duré quatre jours. En novembre 2014, plus de 150 cm de neige avaient recouvert la région. Mais ce genre de tempête, liée à un plan d'eau, se produit habituellement au début de l'hiver, alors que l'eau des Grands Lacs est exposée. Cette eau peut alors s'évaporer et générer des bandes stationnaires de neige forte. Une telle tempête devient plus rare en février, car normalement, plus du tiers de la surface des lacs est recouverte de glace. Il y a donc moins d'eau qui s'évapore.

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Une amélioration possible

Mais la situation actuelle ressemble à celle rencontrée habituellement au mois de décembre. Ce genre de tempête monstre serait donc possible en février, voire en mars, si la situation ne change pas. Cependant, pour avoir de gros épisodes de bourrasques, ça prend de gros épisodes de froid, ce qu'on ne prévoit pas pour l'instant au cours des prochaines semaines. Heureusement, les températures devraient être à la baisse dans cette région au cours des prochains jours. La couverture de glace sur les Grands Lacs devrait donc effectuer une modeste remontée.

Avec la collaboration de Kevin Cloutier, météorologue.

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