Les océans ont atteint leur point le plus chaud en 2022

Dernier match, troisième période, et le climat perd son gardien. L’an dernier, les océans ont enregistré leur température la plus élevée depuis que l’on compile ce type de données.

La nouvelle, qui provient d’une étude publiée dans Advances in Atmospheric Sciences, est passée un peu sous le radar parmi toutes les autres au sujet du climat de 2022. Pourtant, elle aurait dû activer toutes nos sonnettes d'alarme.

Plus de 70 % de la surface de la planète est recouverte d’eau. Ceci a, évidemment, une énorme influence sur le climat mondial. Ces océans absorbent 90 % de la chaleur causée par les gaz à effet de serre que nous émettons depuis plus d’un siècle. Depuis les années 60, les chercheurs mesurent régulièrement le contenu thermique des océans, soit l’énergie absorbée par l’eau. Dans les 20 dernières années, des milliers de flotteurs enregistrent la température et la salinité de l’eau dans le cadre du projet international Argo pour permettre de calculer les anomalies.

Global Ocean Heat Content 2022 NCEI NOAA

Graphique tiré de l'étude montrant l'augmentation du contenu thermique des océans (2000 m de profondeur) depuis les années 60 ainsi que les anomalies comparé à la moyenne 1981–2010 selon les données de la NOAA (Source : Advances in Atmospheric Sciences)

Depuis des décennies, l’influence des océans ralentit la montée des températures mondiales, car l’eau prend plus de temps à varier en température que l’air. La couche supérieure des océans contient plus d’énergie thermique, de chaleur absorbée, que l’atmosphère de la terre. Imaginez deux casseroles sur une cuisinière, une pleine d’eau et l’autre pleine d’air. En mettant le feu au maximum, on se brûlera d’abord dans celle pleine d’air, car dans l’autre l’eau n’a pas encore eu le temps de se réchauffer.

Les océans ont toujours stabilisé le climat de la Terre, justement parce que l’eau varie lentement en température. Mais c’est aussi vrai dans l’autre sens. Si les océans continuent de se réchauffer, il leur faudra plusieurs décennies avant de se refroidir à nouveau. Plusieurs décennies où ils influenceront radicalement le climat mondial.

Plus la température de surface des océans sera élevée, plus intenses seront les systèmes tropicaux. Ce réchauffement permettra aussi à une plus grande quantité d’humidité de s’accumuler dans l’air, causant des pluies plus intenses. On s’attend à ce que la fréquence et l’intensité des inondations sur Terre augmentent au cours des prochaines décennies.

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Les chercheurs ont aussi remarqué qu’il n’y a pas juste la surface des océans qui affiche des valeurs records. Les océans sont aussi plus chauds plus profondément, jusqu'à 2000 m de profondeur. Lors du passage d’un cyclone tropical sur une région, les vents agitent la mer. Il se crée alors un brassage, l’eau chaude de surface se mélange aux eaux plus froides qui se trouvent à une profondeur moyenne. Dans le sillage d’un système tropical, l’eau est toujours un peu plus froide à cause de ce processus.

Plus les océans se réchauffent en profondeur, plus la température de l’eau de surface reste élevée malgré le brassage généré par le passage d’un système. Puisque ces systèmes se forment sur les eaux chaudes, ils continueront de le faire même après le passage d’un autre cyclone. La période naturelle de répit causée par le brassage disparaîtra.

L'information est d’autant plus troublante que notre planète connaît actuellement une phase La Niña depuis maintenant trois ans. Normalement, pendant cette phase, la température moyenne du globe diminue. C’est le contraire lors de la phase opposée, El Niño, où elle augmente. Ces deux phénomènes se forment dans le Pacifique, mais ont un effet sur le climat mondial.

C’est sans compter que le réchauffement des océans va engendrer la fonte plus rapide des glaces situées aux pôles. Tout comme les océans, les calottes de glace ralentissent le réchauffement planétaire. Plus les océans se réchauffent, plus les glaces vont disparaître et plus le climat va s’emballer.

Image bannière : coucher de soleil à Frankston Beach, Victoria, Australie (Source : Boy Anupong/Getty Images)