Malgré le décès de sa femme, il décide de continuer

Leur projet a commencé à deux. Mais c’est en solo qu’Ernest Gasser a poursuivi l’aventure. La vie nous réserve parfois des surprises. Et ce ne sont pas toujours les meilleurs. Rencontre avec un homme résilient, persévérant et, surtout, optimiste.

Août 2016, Ernest Gasser et sa conjointe, Sylvie Chagnon, achètent le domaine viticole, UNION LIBRE cidre & vin, situé à Dunham.

Ils sont en terrain presque connu.

Ernest est un ancien agriculteur. Pendant 30 ans, il a été propriétaire d’une ferme laitière. Sylvie a été comptable pour le groupe Pharmaprix. Pour réussir à relever ce nouveau défi, ils ont uni leurs forces et se sont retroussé les manches.

« J'ai décidé de changer de vocation, de changer de liquide. (Rire) Moi, je dis toujours : quand on vient de l'agriculture, on est très humble et on est des travaillants. Alors, on s’est renseigné, on a pris des cours d’entretien de vignobles et de vinification et on s’est lancé. » - Ernest Gasser, propriétaire d’Union Libre

Deux ans plus tard, en 2018, la vie leur fait prendre un chemin de traverse. On diagnostique alors chez Sylvie un cancer du cerveau.

« Ça a été très, très difficile. Vraiment très difficile. Vers la fin, je ne savais même pas si j'allais passer à travers moi-même… J'essayais le plus possible de l’amener au vignoble, pour qu’elle garde sa routine et qu’elle soit encore présente. Et finalement, le 21 janvier 2020, à l’âge de 58 ans, elle a demandé l'aide médicale à mourir. On a pu faire ça à la maison, chez nous. »

Afin de garder sa mémoire vivante, Ernest a planté sur sa terre 7 500 vignes. La nouvelle plantation est dédiée à sa douce Sylvie. À sa façon, elle continue de l’accompagner jour après jour.

« C’est pour ça que maintenant, je continue l’aventure tout seul. Je suis un éternel optimiste. Il n’y a rien qui arrive pour rien. La famille de Sylvie m'a dit qu'ils n'auraient jamais été capables de faire ce que j'ai fait. Que je lui avais assuré une qualité de vie jusqu'à la fin. Et que je pouvais en être très fier. »

En lien avec les années difficiles qu’il a traversées, j’ai demandé à Ernest si, avec le recul, il regrettait son choix, celui de ne pas être resté producteur laitier.

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« Non pas du tout. Je suis trop bien, ici. Chaque fois que je vais dans mes champs, plus haut, et que je regarde vers Montréal, je me rends compte de la chance que j’ai. Ce projet-là, je l’ai choisi et j’en suis vraiment heureux. Je suis bien parce que je ne suis pas loin de chez moi. Je suis venu au monde à 20 minutes d'ici, à Cowansville, alors je ne suis pas dépaysé pantoute. (Rire) »

Tout de même, si on compare la vie d’avant avec celle de maintenant, c’est tout un changement non?!

« Eh bien, avec les vaches, on avait des robots de traite, ça, ça sonne à 2 heures du matin. C’est tôt! Ici, les vignes me laissent dormir un peu plus longtemps. C’est déjà mieux. Moi, je dis toujours, au lieu de me lever à 4 heures, je me lève à 4 heures et demi, fait que je gagne une demi-heure par jour. Sur l'année, ce n'est quand même pas pire. (Rires) »

À part l’heure, il y a une chose qui ne change pas et c’est le travail. Le travail physique, je parle.

« Moi, je suis quelqu'un qui aime travailler fort. J'aime être à quatre pattes dans le champ. On enlève les feuilles à la main pour laisser entrer les rayons du soleil qui chassent l'humidité. Je dis toujours : j'aime mieux ramasser de la roche pendant huit heures dans le champ que faire deux heures de bureau. »

Et si on lui demande de choisir entre un verre de vin ou un verre de lait, qu’est-ce qu’il répond?

« Pas que je n'aime pas le lait, mais mon choix serait plus un verre de vin blanc ou de rosé. (Rire) Je mange du fromage, par exemple. (Rires) Je mange beaucoup de fromage avec mon vin blanc. Ouais, ouais, ouais, ouais. »

Malgré les épreuves, malgré la douleur et la tristesse, la vie continue. Le temps a passé et Ernest a de nouveau rencontré quelqu’un. Cette personne s’est déposée tout doucement sur sa route et depuis, elle marche à ses côtés. Cette belle histoire peut se poursuivre à nouveau à deux.