1,5 million d’années de données météo bientôt disponibles

Une équipe australienne est à la recherche, depuis dix ans, du lieu idéal pour forer et extraire une carotte de glace, longue de 3000 m, du continent antarctique, qui pourrait nous donner une image des conditions météo sur Terre depuis un million et demi d’années. Jusqu'à présent, nous possédons, grâce à cette technique, un portrait du climat qui s’étend sur 800 000 ans. L’information contenue dans une telle carotte de glace est importante afin de mieux comprendre les cycles terrestres passés, mais elle sera aussi très utile pour les modèles climatiques de demain.

Ce n’est pas parce qu’il fait froid qu’il neige

Contrairement à ce que plusieurs pensent, le continent ne reçoit pas des quantités astronomiques de neige annuellement. Les conditions hostiles qui sévissent dans cette portion du globe sont surtout dues aux vents qui soulèvent facilement la neige au sol pour donner des conditions qui s’apparentent à celle d’un blizzard. Certaines stations enregistrent seulement entre 30 et 40 cm en moyenne par année. C’est l’endroit le plus froid sur Terre et quand il fait froid, l’atmosphère est limitée dans sa capacité à contenir de l’humidité. Une forte accumulation de neige à très basse température est assez rare. En janvier 2019, il est tombé près de 20 cm sur Montréal pendant que le mercure indiquait -19 °C. Cela ne s’était pas vu en cent ans. L’endroit choisi pour le forage en Antarctique possède une température moyenne annuelle de -51 °C.

Lorsque la neige tombe, des molécules d’air se retrouvent coincées entre les branches des flocons. Une fois au sol, cet air est emprisonné par les flocons qui s'empilent. Au fil des ans, l’accumulation de chutes de neige subséquentes exerce un poids sur les couches précédentes, les comprimant. Ce faisant, la neige ainsi compactée se transforme lentement en glace au fur et à mesure sous le poids de la neige plus récente. C’est parce que les accumulations annuelles sont faibles qu’il ne faut pas creuser profondément pour rencontrer de la neige tombée au siècle dernier.

Pourquoi faire parler la glace?

Une fois le site de forage choisi, cela prendra plusieurs saisons estivales australes pour extraire cette carotte, puisqu’une seule section de trois mètres peut prendre jusqu'à deux heures à récupérer. Selon le chef de l’équipe, chaque mètre retiré des portions les plus profondes du puits contient environ 14 000 années de données climatiques. Chaque centimètre de glace sera méticuleusement analysé au fil des prochaines années.

On espère, ainsi, avoir une meilleure compréhension du climat pendant le Pléistocène moyen qui se situe entre 800 000 ans et 126 000 ans avant aujourd’hui. C’est le moment où les cycles de périodes glaciaires sont passés d’un retour tous les 41 000 ans à un retour tous les 100 000 ans.

Selon un chercheur de l’Institut Polaire des sciences italien, comprendre cette période est importante, car les implications sont grandes pour comprendre le climat d’aujourd’hui. Ces recherches permettront de mieux évaluer l’impact des concentrations de CO2 sur le climat du Pléistocène moyen. Si on comprend mieux cette variable, on sera plus en mesure d'évaluer le genre de climat mondial que nous réserve le futur. Comprendre comment et pourquoi notre climat a basculé entre des périodes glaciaires et des périodes sans glace va grandement améliorer notre compréhension du système climatique terrestre.